Arrêt de la Cour de cassation du 13 Septembre 2023

Droit des affaires

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Il est désormais possible d’acquérir des congés payés pendant un arrêt maladie

 

 

En Bref

> Selon l’article 31, §2 de la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne « Tout travailleur a droit à une limitation de la durée maximale du travail et à des périodes de repos journalier et hebdomadaire, ainsi qu’à une période annuelle de congés payés. »

> Le droit au congé annuel payé constitue un principe essentiel du droit social de l’Union (CJUE 6 novembre 2018).

> S’agissant d’un salarié dont le contrat de travail est suspendu par l’effet d’un arrêt de travail pour cause de maladie non professionnelle, les dispositions de l’article L.3141-3 du code du travail, qui subordonnent le doit à congé payé à l’exécution d’un travail effectif, ne permettent pas une interprétation conforme au droit de l’Union.

> Les dispositions de l’article L. 3141-3 du Code du travail sont écartées car non conformes au droit de l’Union européenne précité. Tout salarié dont le contrat de travail est suspendu par l’effet d’un arrêt de travail pour cause de maladie peut prétendre à ses droits à congés payés au titre de cette période.

Antérieurement

  • Principe : un salarié a droit à un congé de deux jours et demi par mois de travail effectif.
  • Certaines périodes sont assimilées à du travail effectif, notamment une période ininterrompue d’un an pendant laquelle un salarié voit son contrat suspendu pour cause d’accident du travail ou de maladie professionnelle (Article L3141-5 du Code du travail).
  • Effets :
  • Un salarié en arrêt pour accident du travail ou maladie professionnelle acquiert des droits à congés payés qu’il pourra reporter après la suspension du contrat.
  • Un salarié dont la suspension du contrat avait une cause non professionnelle perdait son droit à l’acquisition de congés payés. Les congés non pris à la fin de la période de référence étaient perdus.

Désormais

  • Mise en conformité du droit français sur le droit de l’Union européenne en matière de congés payés.
  • En cas d’accident du travail ou de maladie professionnelle, l’acquisition de jours de congés payés n’est plus limitée à un an.
  • Alignement du régime des arrêts de travail de nature non professionnelle sur le régime des arrêts de nature professionnelle s’agissant de l’acquisition de congés payés. Tout arrêt de travail pour maladie ouvre désormais droit à des congés payés.
  • La prescription du droit à congé payé ne commence à courir que lorsque l’employeur a mis son salarié en mesure d’exercer celui-ci en temps utile.
  • A la fin de la période de référence, le salarié qui n’aura pas pu bénéficier de ses congés payés pourra les reporter à l’issue de la suspension du contrat. La durée durant laquelle les congés pourront être reportée n’a pas été tranchée par la Chambre sociale.

Risque contentieux

  • Le risque contentieux est faible s’agissant des salariés ayant connu des périodes d’arrêt maladie de courte durée.
  • Le risque contentieux est plus élevé s’agissant des salariés ayant connus une période de suspension de contrat de longue durée en raison d’un arrêt de travail pour cause non professionnelle.
  • Les arrêts de la Cour de cassation sont silencieux quant aux demandes relatives à l’acquisition de congés payés supplémentaires acquis au titre d’une convention ou accord collectif.
  • Selon l’article L. 3245-1 du Code du travail, l’action en paiement ou en répétition du salaire se prescrit par trois ans à compter du jour où celui qui l’exerce a connu ou aurait dû connaître les faits, ou, lorsque le contrat de travail est rompu, des trois années précédant la rupture du contrat.

Prescription

  • Le point de départ du délai de prescription est fixé au jour de l’expiration de la période légale ou conventionnelle au cours de laquelle les congés payés auraient pu dû être pris, si tant est que l’employeur ait garanti l’effectivité du droit à ces congés. En l’absence de fixation et de diligences qui lui incombent légalement (demande de prise de congés ; report…date où le juge peut fixer ce point de départ), aucun point de départ n’existe.
  • Sans point de départ du délai de prescription, celle-ci est inopposable au salarié, dont l’action devient imprescriptible.
  • Vigilance :
  • L’arrêt du 13 septembre 2023 n° 22-10.529 a confirmé l’octroi de l’indemnité de congés payés sur une période de dix ans en considérant que l’employeur n’avait pas accompli les diligences nécessairespour garantir le droit du salarié aux congés payés, point central de l’imprescriptibilité.
  • Or, dans les faits d’espèce, la relation entre les parties a été requalifiée en contrat de travail devant les juges du fond. Ainsi, les diligences de l’employeur n’ont pu être établies. En pratique, sont considérées comme diligentes les dispositions des articles D. 3141-5 et R. 3243-1 du Code du travail.
  • Finalement, l’action est imprescriptible dès lors qu’aucun point de départ du délai de prescription ne peut être fixé. De plus, l’acquisition de jours de congés payés peut viser remonter sur de nombreuses années s’il est établi que l’employeur n’a pas effectué les diligences nécessaires pour garantir au salarié son droit à congés payés.

Préconisations

  • Pour les entreprises, il s’agit de mettre à jour les procédures de paie afin de permettre l’acquisition de jours de congés payés à tous les salariés arrêtés pour cause de maladie, quelle qu’en soit l’origine (professionnelle ou non).
  • S’agissant des salariés désormais créanciers de congés payés, il est préférable d’attendre que ceux-ci se manifestent en se limitant à la période de prescription de trois ans.

 

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